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Mars 2005
En quoi lentrée en vigueur du protocole de Kyoto va-t-elle «sauver» le climat à supposer que lhomme soit réellement en train de le bouleverser? En rien, dans la mesure où les émissions de gaz à effet de serre vont continuer daugmenter massivement. Grâce, entre autres, aux organisations écologistes, dont la lutte contre les énergies nucléaires et hydrauliques a bétonné pour longtemps la position dominante des agents fossiles.
«Ne nous leurrons pas. Le protocole de Kyoto nest pas le fruit dune mobilisation citoyenne», estime le magazine scientifique Fusion (No 102, octobre 2004). «Il est plutôt le dernier avatar dune stratégie malthusienne visant à freiner le développement des pays émergents, de la Chine en tout premier lieu». Il est en effet frappant de constater à quel point la Chine revient de façon obsessionnelle dans le discours des responsables internationaux, dès que lon aborde les sujets de lénergie et de lenvironnement.
Il est vrai que la perspective est saisissante. La Chine, à elle seule, augmentera ses émissions de gaz carbonique de près de 4 milliards de tonnes entre 2002 et 2030. Cest plus que la totalité des pays riches, dont les rejets augmenteront, eux, de 3,3 milliards de tonnes au cours de la même période. Au vu de cette estimation de lAgence internationale de lénergie, lambition du protocole de Kyoto, qui impose une réduction globale de 5,5% des émissions des pays industriels, paraît totalement dérisoire.
Doute scientifique

Faut-il sen émouvoir? Car après tout, contrairement à ce que laisse supposer le déferlement médiatique, il ny a pas unanimité au sein du monde scientifique sur les causes des changements climatiques. Comme le rappelle dailleurs la récente démission du Groupement intergouvernemental sur lévolution du climat (GIEC) de Christopher Landsea: «Je ne peux pas continuer à participer à un processus que je considère comme motivé par des préjugés scientifiquement non fondés», a déclaré ce responsable de la recherche au Laboratoire docéanographie et de météorologie atlantiques (NOAA).
Pour le professeur Marcel Leroux, directeur du Laboratoire de climatologie de lUniversité de Lyon, le réchauffement global est une hypothèse fondée sur des relations simplistes, qui annonce une élévation de la température proclamée mais non démontrée: «Les contradictions sont nombreuses entre les prédictions et les faits climatiques directement observés. Lignorance délibérée de ces distorsions flagrantes constitue une imposture scientifique», estime-t-il.
Les modèles climatiques politiquement corrects prévoient une hausse de la température. Cest devenu un postulat indiscutable. Or la hausse moyenne constatée depuis le début de la révolution industrielle à nos jours, sur laquelle sappuient certains milieux pour annoncer lapocalypse climatique, est de
0,6 degré centigrade. Ce qui correspond à la variation annuelle des températures entre Marseille et Nice. Doit-on, à partir dune fluctuation aussi dérisoire, bouleverser les économies régionales et condamner les pays pauvres au non-développement ?
Lobbysme vert

La perspective écologiste malthusienne est dans tous les cas vouée à léchec, face au formidable besoin en développement de pays comme la Chine, lInde ou le Brésil. Claude Mandil, le directeur de lAgence internationale de lénergie, vient de le rappeler en présentant les perspectives mondiales publiées chaque année par lagence: les programmes déconomies, aussi contraignants soient-ils, ne permettront pas dinverser la hausse continue des émissions de gaz carbonique. La seule solution réaliste consisterait à engager sans délai un véritable programme de substitution énergétique.
Or les possibilités de substitution à grande échelle ont été pratiquement réduites à néant par ceux-là même qui brandissent lépouvantail climatique. Autrement dit, en luttant sans relâche contre le développement de lénergie nucléaire dans les pays industriels et contre la construction de grands ouvrages hydrauliques dans les pays en développement, les organisations écologistes ont consolidé à long terme la toute puissance des agents fossiles.
Nonobstant ces considérations, et quelle que soit la validité du dossier scientifique du changement climatique, il existe de très bonnes raisons dalléger le rôle écrasant des énergies fossiles dans lapprovisionnement mondial. Pour des raisons géopolitiques tout dabord: la diminution du poids du pétrole aurait pour conséquence de réduire les risques de guerre dans plusieurs régions du monde. Pour des raisons financières ensuite: linstabilité et les hausses massives des prix des agents fossiles ont pour effet de fragiliser les économies de nombreux pays dans le monde. Pour des raisons sanitaires enfin: ces énergies polluent massivement lair que nous respirons et portent atteinte à la santé de nombreux individus.
Taxe aléatoire

La Suisse, pour atteindre ses objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, entend privilégier la voie fiscale. La question fondamentale relative à son projet de taxation du CO2, et qui semble avoir été perdue de vue, est de déterminer dans quelle mesure il en résulterait une diminution effective des rejets. Or rien ne permet daffirmer que ce sera le cas.
Une telle taxe constituera en revanche une atteinte à la compétitivité de léconomie nationale, faute de mesures équivalentes dans les pays concurrents. Elle aura également pour conséquence de détourner des moyens dinvestissement de léconomie productive, et dengraisser une bureaucratie que tout le monde prétend par ailleurs vouloir alléger. Cest pourquoi la Fédération romande pour lénergie, éditrice de la présente lettre, a pris position contre les quatre variantes de taxe CO2 mises en consultation par le Conseil fédéral.
Ce rejet ne doit pas être assimilé à de lindifférence à légard des risques climatiques et des déséquilibres énergétiques. La situation est réellement préoccupante. Il ressort des dernières analyses à léchelle mondiale que la consommation énergétique va augmenter dau moins 60% au cours des vingt à trente prochaines années. Et, beaucoup plus grave, que cette hausse sera majoritairement couverte par les combustibles fossiles, faute dalternatives réelles.
Auto-goal
Une contribution utile de la Suisse à une véritable politique de substitution supposerait la mise en uvre rapide des mesures suivantes: valorisation du solaire thermique et du bois énergie, encouragement de la pompe à chaleur dans lhabitat par des dispositions promotionnelles et fiscales, allègement des contraintes en matière de débits deau. Mais aussi labrogation des mesures de discrimination du chauffage électrique adoptées par certains cantons dans les années 80, et dont le seul résultat a été dassurer la position dominante des combustibles fossiles.
A quoi sajoute, de lavis de notre fédération, la mise en chantier dans les meilleurs délais dun stockage définitif des déchets radioactifs. Les solutions techniques existent. Il revient désormais aux responsables politiques de faire avancer les dossiers. Le but majeur, en loccurrence, est de sauvegarder pour lavenir une production délectricité exemple de CO2, autrement dit le maintien de loption nucléaire.
La proposition des Verts et des socialistes de remplacer les ouvrages nucléaires existants par des centrales à gaz serait une absurdité écologique et économique. Il en résulterait une hausse de 25% des émissions de gaz à effet de serre et limpossibilité, pour notre pays, de se conformer aux accords de Kyoto. Bref, un superbe auto-goal!
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