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Avril 1995
20 ans de nucléaire
français

Importateur
net d'électricité en 1979, la France exporte
aujourd'hui l'équivalent d'une fois et demi la
production de courant de la Suisse. Ce taux d'indépendance
énergétique est l'un des résultats
les plus spectaculaires de l'ambitieux programme nucléaire
de notre voisin. Vingt ans après le lancement
de ce programme, l'heure est au bilan.
Aujourd'hui, Electricité de France figure au
septième rang des exportateurs de l'hexagone,
pour un chiffre d'affaires de près de 15 milliards
de francs. Et cette exportation, contrairement à
ce qui est parfois prétendu, ne se fait pas au
détriment du consommateur français, mais
à son bénéfice: grâce aux
marges ainsi dégagées, il paie son électricité
3,5% moins cher que la moyenne des Européens.
Quant aux tarifs facturés à l'industrie,
ils sont jusqu'à 30% inférieurs à
ceux d'autres pays du continent. Raison pour laquelle
des groupes étrangers importants implantent désormais
en France des usines grandes consommatrices d'électricité.
On estime aujourd'hui que 6400 emplois industriels ont
été récemment gagnés par
l'attrait du kilowattheure nucléaire bon marché.
Il est parfois prétendu que ce coût favorable
n'inclurait pas le prix du démantèlement
des centrales, ni celui du traitement et du stockage
des déchets. En réalité, EDF a
provisionné jusqu'ici près de 30 milliards
de francs pour le démantèlement et plus
de 90 milliards pour la gestion des déchets.
Malgré ces coûts supplémentaires,
le kilowattheure nucléaire reste en moyenne près
de 35% meilleur marché que le charbon et le gaz
à cycle combiné.
Autre reproche des antinucléaires: le programme
français s'appuierait sur un endettement exorbitant.
Or, s'il est vrai qu'EDF s'est fortement endettée
pour construire les réacteurs dans les années
70, un tel endettement est parfaitement normal dans
une activité aussi capitalistique que la production
d'électricité. En outre le rapport endettement
sur chiffre d'affaires, seule véritable mesure
de l'endettement relatif, n'a jamais été
aussi bas qu'aujourd'hui. Il est pour la première
fois descendu en dessous de 1 en 1993 (0,96), alors
qu'il était monté au-dessus de 3 lors
du financement des grandes centrales hydrauliques, entre
1953 et 1962.
La hausse des taux d'intérêt au début
des années 80 avait provoqué en retour
une augmentation spectaculaire des charges financières,
qui atteignaient 27% du chiffre d'affaires en 1983.
Ces charges sont entretemps tombées en
dessous de 10% grâce à un effort systématique
de réduction de la dette. Contrairement à
bien d'autres pays, cette amélioration constante
de la situation financière s'est faite sans apports
de fonds publics. Ceux-ci, qui finançaient encore
le tiers des investissements dans les années
60, ont complètement disparu depuis 1982.
Avec le recul, on constate que le nucléaire est
l'une des plus brillantes réussites industrielles
de la France. Il faut se rappeler à ce propos
qu'elle est due essentiellement au courage politique
et à la vision humaniste d'hommes élevés
dans une atmosphère de grand dessein, dont il
est politiquement correct de se moquer aujourd'hui.
Pour ces hommes, le rôle du politique ne consistait
pas à aller dans le sens du vent ou à
se conformer servilement à ce que faisaient les
autres pays de la planète, mais plutôt
à déterminer en conscience ce dont le
pays avait besoin.
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